Nuit câline à la Villa Mon Rêve : Juillet 1977 (IBC, 1977)
Parmi les albums qui ont compté au rayon French Pop belge, j'aurais pu choisir Comme La Romaine de Jacques Duvall ou le premier album de Lio, mais j'ai finalement envie de faire découvrir cet album méconnu, secret étrangement bien gardé pour les uns, ou kitscherie sans nom pour les autres. En ce qui me concerne, il est tout simplement ma porte d'entrée magique dans la pop belge en français : je l'ai loué lors de ma première visite au Discobus à Huy en 1978. J'avais 16 ans.
Côté textes : les paroles de Michel Moers sont un vrai régal. Elles évoquent un quotidien pris sur le vif, vaguement aquoiboniste, mélangeant très subtilement des questions existentielles (La route est plus précise que mon chemin ou Chaque jour est un nouveau jour à perdre) à des anecdotes ou à des révélations plutôt inattendues sur l'amour (Librairie ouverte/Librairie, abri du vent je rentre dedans […] /Juste sous ma main au rayon fesses/Les photos libérées des filles qui se savonnent/Quoi qu'on en dise si on pouvait les trombonner ça f'rait du bien/Mais quand on écrit à leur journal/Ils disent qu'ils les connaissent pas/Ils veulent pas nous donner leur adresse). Ça parle de la Belgique aussi (La Princesse est salariée), du temps qu'il y fait (Pleut tellement ici/Qu'on en est tout mouillé/Même que nos mains, nos pieds/Commencent à se palmer), ou qui y passe (Rien à se dire aujourd'hui sans nouvelles/Il nous reste à parler du passé). D'une ironie drôle, ces chansons se situent au croisement improbable entre Albert Marcoeur et Dick Annegarn, avec quelques poussées de Nino Ferrer, voire de Pierre Vassiliu.
Côté musique : on croise d'évidentes facilités pop (à nouveau Michel Moers, certainement) parmi d'incroyables et très inventifs arrangements musicaux (dominés par le savoir-faire et le violon électrique de Jeannot Gillis qu'on retrouvera dans Univers Zero, Julverne et le Quatuor Halvenalf), plein de rebondissements étranges (mesures tronquées, séquences mélodiques envoûtantes), de formidables harmonies vocales et de plages instrumentales ambitieuses aux phrasés très jazz-rock… On est en 1977 : on saisit l'impact du Mahavishnu Orchestra de John McLaughlin, mais peut-être aussi du folk-rock du groupe français Malicorne ou de la pop exquise et précieuse du groupe québécois Harmonium.
Par sa musicalité très marquée et ses formats atypiques - en moyenne 4 minutes, mais aussi 6 (“Podferdeck, Quelle Drache“ !) et 10 minutes (Mardi, 14h30) - , les chansons déviantes de Juillet 1977 racontent la fabuleuse et très belge métaphore d'une vie intérieure sensible, parfois désabusée et souvent à côté de la plaque.
Sorti en vinyl (et non ré-édité à ce jour), ce LP est un bel instantané d'une musique pop progressive, juste avant l'avènement de l'électronique et la révolution punk, préfigurant probablement les Honeymoon Killers et évidemment le groupe Telex, dans lequel Michel Moers réapparaît subitement en smoking, laissant son ciré jaune au vestiaire.
Marc Morgan.
→ Accéder à la playlist “Nuit câline à la Villa Mon Rêve : Juillet 77“ sur Youtube.
La plupart du temps (Nuit Câline à la Villa Mon Rêve) :
é Éric Chale : guitares électriques et acoustique, voix / å : Alex Furnelle : Basse électrique / j : Jeannot Gillis : violon, trompette, tuba, trombone : m Michel Moers : guitare acoustique, parfois électriiée, voix / p Pierre Narcisse : batterie, percussions.
Épisodiquement :
i Ilona Chale : voix / p Pierre Coulon : flûte traversière / jp : Jean-Paul Laurent : flûte traversière / öö : Charles Loos : Pianos électrique et acoustique / d Denis Van Hecke : violoncelle / ck Christophe Vinck : voix.
Toujours :
œ Daniel Leon : prise de son / xy Michel Dayez : secrétaire des lundis d'Hortense.
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