Cuculte-La-Praline #05

// 25/04/2015

Par Serge Coosemans

Si dans la longue histoire du rock belge, il existe quelques cultes bien répertoriés (Jacques Duvall, Les Tueurs de la Lune de Miel, La Muerte, Channel Zero, Neon Judgement..), il y en a d'autres qui sont un peu oubliés, un peu davantage pris pour des reliques d'un temps passé, alors qu'ils méritent pourtant autant une passion actuelle toujours fiévreuse qu'une réhabilitation massive. Voici cinq exemples de cultes pas cuculs à cultiver...

Cuculte-La-Praline #05 The Subs : Subculture (2008)

Wa Wa Wa Wallifornie

L'autre jour, je me suis rendu compte que je n'avais absolument aucune idée de ce que devenaient The Subs. Il n'y a pas très longtemps, je les ai bien vu prendre le Concorde avec Jean-Pierre Castaldi mais cela fait sinon des lustres que je n'ai pas vraiment entendu parler d'eux et, pourtant, tout roule : ils n'ont pas loin de 21 000 fans répertoriés sur Deezer, plus de 97 000 sur Facebook, sortent des maxis plus vite que Charles Michel une grosse connerie, tournent à gauche, à droite, et en sont déjà à leur troisième album. Perso, j'ai perdu leur trace et pas mal d'intérêt à leur égard à partir de The Pope of Dope, enregistré avec les Party Harders en mode Wa Wa Wa Wallifornie, selon mes propres critères, une abomination totale. A leurs débuts, j'aimais pourtant bien les Subs. Je trouvais que ces mecs étaient même dans un trip musical assez incroyable, qui consistait à fabriquer des bombes de dancefloors de très bonne qualité à base de tout ce que la dance-music a fait de pire : la trance de kermesse, la rave-music d'auto-scooters, la new-beat la plus déplorable, les effets « klaxons de foot »...

Comme Daft Punk, les Subs semblaient fouiller les poubelles et les brocantes de l'histoire de la dance-music pour en tirer des sons à recontextualiser dans des productions certes toujours bien cheesy mais fédératrices et efficaces, de facture très professionnelle, en soi rigolotes mais aussi là pour être prises avec un certain sérieux. Au contraire de Daft Punk, par contre, je n'ai jamais eu l'impression qu'il y avait chez The Subs la moindre prétention. Ce qui n'est jamais négligeable dans un monde aux chevilles aussi enflées que celui de la production electro.

Fuck That Shit

Jeroen De Pessemier, rebaptisé Papillon était chanteur chez Foxylane, un groupe rock flamand ayant connu son petit succès, avant de lancer The Subs avec deux DJ's gantois alors connus sous les noms de Starski et Tonic. La Flandre a assez vite aimé et soutenu ces petits poulains -version plus jeune, plus sale et plus rave de Soulwax- qui se sont retrouvés sur une base régulière dans à peu près tout ce que le Nord du Pays compte comme clubs et festivals. Un brin putassiers, pas le moins du monde finauds, ils n'en étaient pas moins bons, meilleurs même que Justice avec lesquels ils partageaient cette idée très à la mode il y a 8 ou 9 ans : coller à la dance-music une attitude rock, exagérément rock, jouer au Motley Crüe de catalogue 3 Suisses. C'est ridicule, grotesque même, mais ça fout une ambiance et une patate de feu.

Subculture, le premier album des Subs, tient presque plus de la compilation de maxis sortis depuis 2006, entrecoupée de fonds de tiroir, que de quoi que ce soit d'autre mais cela reste selon moi ce que le groupe a fait de mieux. Les locomotives du disque, dont certaines étaient déjà assez anciennes à la mise sur le marché du LP, ont pour titres Fuck That Shit, Kiss My Trance et Music is The New Religion et sont de véritables pièges à blind-tests. Ca sonne en effet comme des vieilleries du début des années 90, qu'aurait pu sortir le label R&S, et c'est bien ce qui rend ces morceaux imparables. Ils sont intemporels, ultra-efficaces, peuvent s'apprécier autant des bourrins et des barakis que des petits connaisseurs pour qui la meilleure dance-music n'a vraiment que foutre des notions de bon et de mauvais goût, du moment que ça fait lever les bras sur un dancefloor. En fait, ces titres sonnent comme des classiques, peuvent se mixer ou s'enchaîner très naturellement à des hymnes électroniques à la fois très populaires et néanmoins foncièrement bons comme le Go de Moby ou le Hey Boy Hey Girl des Chemical Brothers. Ce n'est pas de la minimale hambourgeoise à apprécier entre membres de la même secte, c'est du gros boum boum fédérateur sans être (trop) crétin, réussi selon les préceptes d'une alchimie aussi rare qu' hasardeuse, peut-être bien un peu magique. Ajoutons à cela que Subculture contient encore une reprise de Prodigy bien meilleure que l'originale (ce qui n'est pas très difficile, mais bon...) et le dossier semble plié : il ne faut pas spécialement être jeune flamand du Pukkelpop avec son bermuda Zeeman, sa boîte à tartines au filet de dinde et un gros Bart Simpson fondu sur la glotte pour kiffer les débuts The Subs. Après, c'est une autre histoire...

Serge Coosemans

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