Gig review : Aline au Bota ou le romantisme à l'anis

// 17/02/2016

Par Maxime Wathieu

En ce doux et charmant 14 février, l’entrée au Bota a gonflé mon sentiment de virilité au plus haut point, à la vue de Jason et Brandon (noms d’emprunts), les deux militaires chargés de protéger les lieux. Je me suis senti fort, puissant, et important, tel un général bourré de testostérone, prêt à hurler «à mon commandement...feu», après avoir craché ses bouffées de cigares cubains. Repos les gars. En réalité, mon sobre uniforme ressemblait plutôt à celui d’un amateur de musique pop apprêté pour aller (espérer) passer un bon moment musical: une veste en cuir et un pantalon noir.

Je suis fan d’Aline, ce groupe marseillais, masculin malgré son nom, leadé par un étrange personnage humoristique, qui a enregistré son dernier album aux studios ICP à Bruxelles avec Stephen Street (l’homme derrière plusieurs albums de Blur ou encore des Smiths). J’ai donc décidé d’aller les voir pour la première fois en concert, afin de vérifier si leur live était à la hauteur de leur disques.

Jouer un dimanche soir n’est pas facile, et chanter en français en Belgique n’est pas facile. Pas de première partie. Une Rotonde relativement vide était à prévoir. Mais lorsque Romain Guerret est monté sur scène pour accorder sa guitare, c’est une salle pleine à craquer qu’il a découvert.

«Vous voulez que je sorte de scène pour faire une vraie entrée triomphale avec tout le groupe ou c’est bon comme ça?»
Tout de suite, le mec annonce le ton de la soirée: une vanne, un tube. Une vanne, un tube. Sans doute une carrière toute tracée pour Rire & Chansons. Je suis très bon public quand il s’agit d’humour lourdaud, même si au final, cette ambiance décalée a un peu freiné ma concentration à me plonger dans l’univers du groupe et des chansons: un monde fluo peuplé de sonorités eighties, synthétiques et fortement réverbérées. On pourrait croire à un énième exercice de style dénué d’intérêt et d’originalité. Mais ces amateurs de pastis n’ont heureusement pas oublié d'ajouter l’ingrédient magique à la recette pop parfaite, que beaucoup de groupes des années 2010 oublient trop souvent: écrire une bonne chanson. Ce soir les mecs d’Aline n’ont pas voulu impressionner, car leurs morceaux n’en avaient pas besoin.

La vie électrique, le dernier single d'Aline, m’a donné envie de sortir en boîte jusqu’à pas d’heure. J’ai ressenti la détresse de l’ennui vécu dans les bleds du fin fond de la France, que Romain raconte dans Chaque jour qui passe. Je bois et puis je danse m’a rappelé qu’alcool et dancefloor forment une combinaison de rêve, ou de cauchemar. Et quand Tu m’oublieras à débarqué, je me suis rappelé pourquoi j’ai écouté ce titre à fond de balle dans ma voiture tous les jours pendant au moins un an, et pourquoi il m’a donné envie de chanter en français.
Les paroles rappellent beaucoup d’influences et de leçons apprises dans la musique d’Outre-Manche: raconter la vie simplement, sans trop jouer sur les mots, pour toucher droit au coeur.

Sur scène, la prestation est réellement live, les cinq musiciens ne s’encombrent pas (ou peu?) de bandes pré-enregistrées. Les beats carrés du batteur et les riffs 80’s sautillants du bassiste m’ont empêché de tenir en place. Les guitares n’étaient pas saturées, mais plutôt d’une douceur mélodique propice à un arrangement sobre, pour laisser de la place au «songwriting». En d’autres termes, la forme était au service du fond, et pas le contraire. Et ça, ça change tout dans un concert. On écoute pour apprécier, on n’encaisse pas un mur du son qui sert juste à impressionner. Les deux sensations se valent, mais ce soir là, devant Aline, j’ai vraiment ressenti un plaisir oublié.

Pour info, Aline remet ça ce jeudi 25 février au Reflektor (Liège)


Photos Aline//Botanique//Bruxelles
© Lara Herbinia-SOFAM

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