Monsieur Pchik a testé pour vous : « Le Rock est-il réac ? » (Posture et imposture du Rock) » par Henry Chartier. Editions Carpentier
Aujourd’hui, chers petits lecteurs adorés, pas de concert mais un bouquin bien intéressant. Sorti il y a quelques temps déjà (ndlr, 2015) mais toujours disponible, à la commande, dans les bonnes charcuteries. Passionné de musique, chroniqueur à ses heures, auteur (notamment d’une belle biographie de Kurt Cobain), Henry Chartier ne s’embarrasse pas des vaches sacrées. Les mythes et légendes à gogo, il les dézingue avec un zeste de bonne humeur, deux doigts de sadisme et surtout une belle plume réaliste et intelligente. Bien sûr, je ne l’ai pas attendu pour me forger mon petit avis personnel sur la question. Je ne crois plus que moyennement au père Noël. Et au fur et à mesure de l’avancée de ma carrière d’être humain, je me suis bien rendu compte que l’« Homo Rockus Erectus » n’était pas vraiment le preux chevalier que l’on pouvait croire ou espérer. A des années lumières de l’image d’Epinal du rebelle anti système, du généreux pirate à l’abordage pour une équitable répartition des richesses, de l’activiste pour un monde plus juste et plus tolérant envers toutes les minorités, il n’est, plus souvent, qu’un grand enfant gâté, colérique, égoïste, narcissique et égocentrique. Ses grandes transhumances étant généralement guidées par l’envie d’échapper au fisc plutôt qu’à une quelconque junte militaire dont il aurait dénoncé les exactions criminelles et qu’il devrait fuir sous peine de mort.
Comme disait Desproges : « Ah bien sûr, si j'avais cette hargne mordante des artistes engagés qui osent critiquer Pinochet à moins de 10 000 km de Santiago… mais je n'ai pas ce courage ». Bref, le Rock n’est pas vraiment de gauche, et ce n’est rien de le dire. Mais loin de se contenter de ce postulat, Henry Chartier creuse beaucoup plus profondément dans le raisonnement. En plus d’être de simples jouissifs profiteurs du système, les rockeurs en seraient carrément des agents zélés, participant (consciemment ou pas) à son maintien et à son ordre. De parfaits garde-fous du capitalisme. En quatre chapitres clairement argumentés, il n’y va pas avec le dos la cuillère l’ami Henry. Oui, en dépit de ses apparences libertaires, le Rock et ses sbires sont des conservateurs garant de l’ordre social. Une imposture en soi. Ni plus, ni moins. Il prend notamment pour exemple ces grandes « messes » que sont les méga-festivals. Quelle aubaine pour les grands dirigeants occidentaux que des millions de jeunes aient se gaver de décibels en pensant « faire la révolution » plutôt que de la faire vraiment en descendant dans la rue !
D’autres exemples plus drôles m’ont également ravi. Son inventaire des grands concerts de charité (le « Charity Rock » comme on dit) est totalement succulent. Ainsi au sujet de ce grand tube « alimentaire » de 1984 (« Do They Know It’s Christmas ? », le fameux « Live Aid » de Saint Bob Geldof), je ne résiste pas à vous livrer son hilarante analyse des paroles : « Ce soir, remercie Dieu que ce soit eux au lieu de nous. Et il n’y aura pas de neige en Afrique durant cette période de Noël … Elles (ndlr, les paroles) laissent en effet supposer qu’il n’y a pas de neige en Afrique, que Dieu existe et qu’en plus les africains sont tous chrétiens ! Trois révélations en deux vers ! … ». J’étais mort de rire, merci Henry !
Une autre anecdote (ndlr, véridique) m’a beaucoup amusé : Elvis Presley envoyant une missive au département américain de l’immigration vers 1963. Il met en garde celui-ci contre le côté terriblement subversif et anti religieux des jeunes groupes britanniques (Beatles et Rolling Stones en tête). D’après le « King », l’arrivée de ceux-ci sur le territoire des U.S.A ne peut que nuire à l’unité de la nation ! Haaaa, sacré Elvis, honnêtement, tu n’avais pas plutôt peur que ces nouveaux venus te piquent quelques parts de marché ? Dingue non ?
Au final, j’ai beaucoup apprécié ce pamphlet anti idées toutes faites. Même si sur certains points, l’auteur se laisse aller à la généralité tout en minimisant les contre exemples et autres exceptions. Notamment sur le côté sexiste du Rock And Roll. Selon lui, le Rock ne compte qu’un nombre insignifiant d’artistes féminines à son panthéon … Je ne partage pas cette opinion et, au contraire, je trouve qu’il y a pléthore de cas … Sa conclusion, quant à elle, me paraît inattaquable. Si le Rock doit se parer des plus beaux atours de la contestation et du progressisme, c’est simplement pour pouvoir se distinguer des autres styles musicaux. Car les contours du Rock sont très flous. Musicalement, il est très difficilement définissable. Quelle différence entre ABBA, période « Dancing Queen » et Les Rolling Stones époque « Emotional Rescue » ? Rien ! Sinon que l’un est catalogué : Disco « mainstream » commerciale et l’autre : Rock. Et dire qu’il aurait juste suffi aux suédois de pisser sur le mur d’une station d’essence (dixit Henry Chartier) pour passer de l’autre côté du miroir !
Cette « imposture » a encore de beaux jours devant elle. Rappelez-vous les développements sacrément racoleurs des tragiques attentats au Bataclan de Paris en novembre 2015. Tout un symbole : les ultras cathos « U2 » accueillants en héros (mais pourquoi finalement ?) les ultras néo-conservateurs « Eagles Of Death Metal » lors de leur concert à Bercy. Un malsain coup de pub que tout cela ? Mais non, vilains médisants à l’esprit mal tourné ! Le Rock ne ment pas ! Jamais ! C’est, au contraire, un message fort ! Ils ne plieront pas ! Et ils continueront à jouer à 100 euros la place (là je parle de U2) parce qu’ils n’ont pas peur ! Normal, ce sont des rockeurs… Des braves moi je dis ! Chapeau les gars ! A la prochaine … Ou pas
! Cz, 20/03/2018.
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