Monsieur Pchik a testé pour vous : Eisbär de Grauzone


// 26/05/2020

Par Mr Pchik

Naguère, lors d’une impromptue rencontre helvétique

Oyez braves enrhumés ! Voici le temps du déconfiturement. Bon, ne jubilez pas trop quand même. Car en cas de retour grippal, c’est aussi un retour direct au pot de marmelade scellé à double tour.


Notez que, personnellement, peu me chaut. Moi, ce qui me dérangerait profondément en cas de « deuxième vague », comme disent les spécialistes (qui d’ailleurs sont unanimes dans leur pointue analyse scientifique selon laquelle une personne à l’article de la mort a plus de « chances » de complications que les autres en cas de contagion… c’est sûr, le vaccin est pour bientôt), ce serait qu’on nomme ce ricochet de pandémie « la New Wave ». Ca, malheureux morveux, je ne le supporterais pas. Symboliquement, la New Wave est essentielle pour moi. Et on ne touche pas aux symboles, non mais ! C’est ma religion, ma secte à moi caramba !



Adolescent vaguement boutonneux, à l’aube des années quatre-vingt, je cherchais désespérément ma voie (ça a très moyennement changé, je vous l’accorde). Or, la vie étant une grande prison, difficile de s’affirmer quand on est isolé. 


A l’instar de l’existence carcérale, où il vaut mieux choisir son gang pour éviter de douloureuses contrariétés quand on perd son savon dans les douches communes, la vie à l’air libre impose, elle aussi, ses codes et ses protections. Quelles étaient mes options tribales ? J’aurais pu être minet, fan de Rick Astley. Mais les blousons Millet blindés de plumes d’oie me foutaient des allergies. J’aurais pu être sportif. Mais il n’y avait aucun sport en adéquation avec mon physique mis à part le puzzle. J’aurais pu être intello geek accro au Commodore 64. Mais, à l’image de la date de péremption sur une boîte de champignons, le concept me semblait flou, voire superflu. Et puis il y avait LA tentation New Wave ! 


Haaa, là, ça m’a parlé ! Le côté sombre, les futals SOS, les Pointer Sisters Of Mercy, Depeche Minds, les Simple Mode ! D’un coup, je passais de la catégorie d’insignifiant gugusse solitaire à celle d’insignifiant gugusse entouré. C’est peut-être un détail pour vous, mais pour moi…

Bref, soyez honnête. Vous oseriez associer le corano et le corona virus en pleine convention d’une amicale d’anciens djihadistes ? Je doute. Téméraire mais pas fou.

Je vous demande donc le même respect pour ma nouvelle vague à moi. On ne peut pas rire de tout, surtout quand j’ai décidé. Sinon, je pourrais devenir incontrôlable. 

Tout ça me rappelle une anecdote aussi inintéressante que vécue. Elle concerne un monument musical propre à cette culture parallèle. J’ai nommé le légendaire single de Grauzone, « Eisbär ». Et ne me dites pas que vous ne connaissez pas ce groupe suisse alémanique, bande d’incultes ignares. Vous avez dû vous secouer le popotin (mais attention, pas trop, ça reste une chanson froide) au moins une fois dans votre vie (je parle aux plus de 40 ans) sur ce méga tube des frères Eicher. Dont l’un des deux est d’ailleurs devenu populairement célèbre par après. C’est facile de le reconnaître, c’est celui dont on a retenu le prénom.


Et l’anecdote dans tout ça, me direz-vous (oui, parce que là, je me rends quand même bien compte que je m’écarte un peu du sujet) ?


Nous y venons camarades. Il y a quelques années, un ami mien, musicien amateur et dragueur professionnel de son état, avait profité d’une petite escapade en Suisse avec son groupe de hard rock pour également pleinement jouir de l’hospitalité helvétique. Il ne s’était pas privé pour ramener au pays plusieurs succulentes spécialités locales : fromages à trous, vin blanc, pâté des Grisons, chocolat mauve, tarte aux noix… Et aussi la serveuse du gîte de montagne.
De plus de dix ans sa cadette, cette sémillante romande arrivait pile-poil à point pour remplacer la mère de ses enfants qui, elle, arrivait doucement à terme d’engagement matrimonial. Fier de sa nouvelle conquête, il vint me la présenter dans la semaine de son retour. Après les présentations d’usage, j’ai eu l’envie de l’éclabousser de ma géographique culture. 


Moi : « Hooo oui, la Suisse, mais je connais bien, holala. Et la musique surtout, d’ailleurs je vais te faire plaisir, je vais te mettre Grauzone. »
Elle : « Grau quoi ? »
Moi : « M’enfin, Grauzone, Ich bin eine eisbär. Tipipip… Tipippip… (pas évident de faire le bip de synthé par écrit). »


La suite est restée gravée à jamais dans le disque dur de la mémoire morte de mes pires cauchemars. La petiote s’est mise à rire à s’en étouffer. Je n’ai plus jamais fait rire une femme comme ça, c’est dire ! Après l’avoir quasiment réanimée, elle m’a demandé si c’était une blague ? Parce que dans son canton natal, il y a une émission de radio locale qui s’appelle : « La pire chanson du week end ». Et ça lui faisait penser à ça. Conforme à leur capitale, cette racketteuse de raclette a foutu mon moral en berne. Je hais les Suisses. Je vous l’avais dit, faut pas toucher aux symboles.

A la prochaine… Ou pas !

RETOUR

ARCHIVES

Avec le soutien de
Avec le soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles service des musiques non classiques
Top