Substance (New Order vu de l’intérieur) par Peter Hook

// 31/10/2017

Par Monsieur Pchik

J’angoisse. J’ai peur de me répéter. Cela fait déjà plus de deux années que je me répands ici en chroniques absconses, sans logique ni pertinence. Heureusement que personne ne me lit car j’ai parfois l’impression de faire toujours la même chose. La routine me guette. Et la routine est plus corrosive que la rouille. Une incurable mycose qui vous transforme radicalement et irrémédiablement.


Sérieux, je ne blague pas. Les témoignages ne manquent pas. Plus tragiques les uns que le autres. Comme cette assistante sociale devenue misanthrope à force d’aider les indigents. Et cette pauvrette qui vendait des gaufres. A la longue de respirer, toute la journée, les vapeurs de pâte, de farine et de sucre en poudre, elle avait développé une allergie totale aux pâtisseries. Impossible pour elle d’en consommer, ça la dégoutait complètement. Bon, là, vous me direz que ce n’est pas trop grave comme symptômes. Mais dans le cas d’une préposée toilettes, ça devient déjà plus dangereux non ? Imaginez une dame pipi, passant sa vie entière dans les effluves d’urines, incapable, dès qu’elle rentre chez elle, d’aller se soulager parce qu’elle ne supporte plus la vue d’une latrine, même la sienne ! Ca le fait déjà moins non ? Et cette dramatique histoire de Waffen SS qui avait fini, tellement lassé de l’immuable et ordonnée répétition de son travail, par devenir fan de Reggae. Il s’était procuré l’intégrale de Bob Marley et avait laissé pousser de superbes dreadlocks. Son addiction au cannabis avait eu raison d’une carrière qui s’annonçait prometteuse... Mmmm, comme quoi, parfois, les drogues ont du bon non ? Enfin, sauf pour Julien Doré. Ho toi ! Julien Doré ! Il ne faut pas me prendre pour un con hein. J’ai très bien compris ou tu voulais en venir avec ton infernale scie radiophonique estivale. Coco câline, coco câline...

Arrête gamin ! Tu crois que je n’ai pas saisi le jeu de mots ? Que je ne vois pas où tu veux en venir, petit renifleur hystérique ? N’essaye pas de m’enfumer Julien ! Et surtout, vas te moucher avant de te repoudrer. Non mais ! D’ailleurs, cette mise en garde s’adresse à tous les pop/rockeurs adeptes du double sens à la noix. On ne me la fait pas à moi. Que ce soit pour la chnouffe (vous vous souvenez de ce groupe allemand « Liquido » et son tube « Narcotic » ? Trop énormes les paroles : « And I call your name, Michael Caine »)...

... ou pour les turlutes, même combat ! Les sucettes de France Gall m’ont toujours fait pouffer de rire. Plus consternant que subversif. Désolé Gainsbourg.

Et le pire, c’est quand on essaye de trouver un sens caché là où il n’y en en pas. Chose qui arrive principalement dans les chansons dites « politiques ». Un exemple : « Paint it Black » des Rolling Stones. Dans ce cas, on est carrément dans le vol, dans l’arnaque intellectuelle, et je pèse mes mots. Associée au chef d’œuvre de Kubrick, « Full Metal Jacket » ainsi qu’à la série à succès « L’enfer du devoir », cette ritournelle en ré mineur (ndlr, à titre informatif, vraiment) des pierres qui roulent a toujours donné l’impression d’être un héroïque pamphlet anti-guerre du Vietnam. Alors qu’en fin de compte, c’est juste la banale complainte d’un gars tellement dépressif qu’il a envie de tout peindre en noir (sans doute torturé par la routine, histoire de donner un petit fil conducteur à ma débridée bafouille). Le seul côté ambigu (voir ambivalent, soyons fous), et qui tient plus du hasard, que l’on aurait pu accorder à ce hit majeur est sa ponctuation. Ainsi, dans un premier temps, le titre officiel (et la place de la virgule a toute son importance) était : « Paint it, Black ». Ce qui peut prêter à confusion. Entre : « Peins ça en noir » et « Peins ça, noir », ça change tout non ? Pour la petite histoire, Mick Jagger et sa bande ont préféré enlever la virgule lors de la sortie de l’album « After Math » (sur lequel figurait ce single) aux USA, histoire d’éviter tout quiproquo raciste (ndlr, vous pouvez vérifier sur Wikipédia, bande d’incrédules).

Bon, tout ça étant dit, est-ce que je n’oublie pas quelque chose moi ? Ha oui ! Et le bouquin me direz-vous (oui, parce que là, je me rends quand même bien compte que je m’écarte un peu du sujet)?

Pour le troisième volet de sa trilogie à succès, Peter Hook s’est lâché. Une brique de près de trois cents pages ! Pas avare le gars. Après avoir traité, à sa façon, de l’Hacienda et de Joy Division, « Hooky » s’attaque à un autre monument du patrimoine mondial de la musique populaire : New Order.

Un style drôle, direct et sans fioritures. Une apparente désinvolture alliée à une facilité déconcertante à dépeindre les événements, même tristes (comme le décès de certains de ses proches), qui relativise positivement l’existence. Enfin, je ne sais pas si je suis clair, mais l’ami Peter parvient à nous faire saisir l’absurdité de la vie et par la même à nous réconcilier avec elle. Respect, non ? De plus, ce bouquin est truffé d’anecdotes plus hilarantes les unes que les autres. L’énumération (que j’espère exhaustive) et la description dans le détail de toutes ses conquêtes féminines (quelle santé !), sa dépendance à la bibine et à quasi toutes les drogues, sa cure de désintoxication et ses blagues potaches lors des réunions d’alcooliques anonymes, la pléthore de concerts ratés de New Order, suivis d’émeutes en tous genres où revient sans cesse un running gag désopilant, soit la mise en garde de l’organisateur de l’événement en question. « Vous ne jouerez plus jamais à … (ndlr, remplacez les trois petits points par n’importe quelle ville de votre choix.) »
Sans oublier ses rapports tendus avec Bernard Sumner, son frère de sang, son meilleur ami et ennemi dans Joy Division et New Order. Celui à qui il doit tout et réciproquement. Une classique relation amour/haine.

Bref, pour reprendre une formule éculée mais qui veut bien dire ce qu’elle veut dire : un bouquin chaudement recommandé !

A la prochaine… Ou pas !


Peter Hook, « Substance (New Order vu de l’intérieur) », Editions Le Mot et le Reste

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