Monsieur Pchik a testé pour vous #18 : Suede

// 10/02/2016

Par Monsieur Pchik

Au Tivoli (Utrecht), samedi 30/01/2016


Oyez braves gens ! C’est la saison des carnavals. J’entends au loin le « boum-boum » abrutissant de la grosse caisse martyrisée par le meneur de revue de service. Une cadence approximative et maladroite. Sorte de galère humaine, rigolarde et grossière, naviguant sur une mer de bière tiède. Je ne sais plus trop bien si c’est Albert Einstein ou Pierre Richard qui disait : « Le jour où les Gilles de Binche lanceront des boules de pétanque à la place des oranges, ça sera la fin du monde ».


Enfin, que ce soit l’un ou l’autre, ça reste une analyse très pertinente non ? Surtout pour quelqu’un qui, comme moi, abhorre les carnavals et autres joyeusetés populaires. Rapide petit retour sur Pierre Richard. Mon ami mélomane, Mathieu Roodetje, me faisait remarquer à juste titre : « Dis Pchik, c’est bizarre. Aucun metteur en scène au monde n’a jamais osé réaliser un thriller avec Pierre Richard ! Pourquoi ? ». La question reste ouverte, en effet.


Oui, donc, comme je disais, et tant pis si je ne me fais pas que des amis, j’ai horreur des carnavals. Je déteste les confettis, les déguisements débiles, les musiques et chorégraphies qui vont avec... En fait, je ne supporte pas le folklore en général. Je dirais même plus : tous les folklores. Ca me met hors de moi. J’en perds mon latin (vaut mieux ça que sa culotte disait ma grand-mère, mais bon, tout de même). Voir des gros bonhommes remplis de paille, avec des plumes d’autruches sur leur tête (autant là qu’ailleurs finalement) marteler le pavé humide avec leurs sabots ridicules et faire la ronde autour d’un braséro, franchement, très peu pour moi. Tous les folklores je vous disais, et c’est vrai. Les roulements de tambours m’horripilent autant que les roulements de tam-tams. Que vous me fassiez assister (de force) à une danse de la pluie comanche (même avec fumette de calumet), à une cérémonie initiatique zoulou, à un défilé de travelos hystériques sur fond de samba dans les rues de Rio ou à un concerto pour flûte de pan en pleine Cordillère des Andes, je dis non ! Pitié ! Et quand le folklore vire carrément à la tradition imbécile et dangereuse, alors je m’insurge avec véhémence ! Caramba ! Les tristes exemples de dérives pittoresques ne manquent malheureusement pas. Ainsi, combien d’ablations de glottes lors des baptêmes estudiantins ? Oui mais c’est la tradition Monsieur, c’est le folklore. Combien de pertes d’oreilles internes chez les derviches tourneurs ?

Oui mais c’est la tradition Monsieur, c’est le folklore. Combien de poulets décapités dans les fiestas vaudous ? Oui mais c’est la tradition Monsieur, c’est le folklore. Combien de toréadors émasculés lors des corridas ? Et combien de taureaux recyclés en corned-beef lors de ces mêmes corridas ? Oui mais c’est la tradition Monsieur, c’est le folklore… Mais le summum du pinacle, chers fidèles lecteurs, la plus cruelle et vicieuse déviance des traditions et folklores à la con, c’est bien le Sirtacouille de mes deux Ki ! Comme son nom l’indique vaguement, cette sympathique petite farandole de terroir nous vient de Grèce. Cousine du Sirtaki et son indémodable Zorba Dance, elle s’en éloigne cependant fortement par son côté très douloureux.


Ainsi, si à la fin de tout Sirtaki qui se respecte, chauffé à blanc par les courbes des belles hélènes, on explose violemment une pile d’assiettes au sol. Le Sirtacouille de mes deux Ki propose une variante quant au final de la représentation. Ce n’est pas sur le carrelage que l’on écrase les assiettes… Votre bien aimé serviteur en a fait les frais lors de son dernier pèlerinage gourmand chez son dealer de moussaka favori. Le serveur embarrassé a eu beau me dire: « Oui mais c’est la tradition Monsieur, c’est le folklore ! », plus jamais tu ne me reverras Spyros ! Que ce soit clair entre nous !

Et le concert dans tout ça me direz-vous (oui, parce que là, je me rends quand même bien compte que je m’écarte un peu du sujet)?

Cette fois, j’ai décidé de déléguer mes pouvoirs. J’ai envoyé en mission aux Pays-Bas mon amie Isa Fromemperor. Voici, à chaud, ce qu’elle a pensé de la prestation du beau Brett Anderson et de ses petits camarades : « Sans aucun doute un des meilleurs concerts auquel j’ai assisté. Un set en deux actes. Premièrement, Suede propose l’intégrale de son dernier album « Night Thoughts ». Le groupe joue caché derrière un écran qui englobe toute la scène, comme une espèce de grand filet blanc. Mais on peut néanmoins, grâce à l’intelligent jeu de lumière, distinguer les musiciens. Sur l’écran, la projection d’une fiction laissant la part belle à l’imagination et au ressenti des spectateurs. Personnellement, j’y ai vu l’histoire d’un couple et de la perte d’un enfant. Un grand moment d’émotion.

Ensuite, petit entracte, les techniciens remettent la scène dans une configuration classique et c’est parti pour un deuxième acte en forme de best of. Tous les classiques de Suede y passent.

Quel concert, quelle énergie, quelle justesse dans le jeu !


Et aussi cet humour typiquement british de Brett Anderson. La grande classe. Le groupe était vraiment heureux d’être là et il a su communiquer cette joie au public. Inoubliable ».

A la prochaine. Ou pas !

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