Fraises, sexe et bisphénols

// 13/04/2015

Par Catherine Colard

La sagesse populaire fait rimer avril avec « ne te découvre pas d’un fil ». Comme je ne suis pas à un paradoxe près, une irrésistible envie de fraises et l’affreux « je n’ai rien à me mettre » printanier m’habitent dès l’arrivée des beaux jours. Peu s’en est fallu que je ne craque pour un kilo de fades fraises espagnoles et quelques achats aussi compulsifs qu’impulsifs.

Une satisfaction pouvant en remplacer une autre, j’ai préféré ce dimanche céder à une nouvelle tradition pascale instaurée depuis quelques années en Wallonie. Mieux que la clope, les accès de boulimie et la drogue, le sexe est gratuit, non polluant et sans date limite de consommation. Il a de plus quelques vertus calmantes sur le rhume des foins et mes pulsions consuméristes. N’écoutant que mes instincts locavores et mon envie de niquer la crise, c’est d’un pas guilleret que je me suis rendue à la grande chasse aux sex-toys de Wépion*. Oui, vous avez bien lu, une chasse aux sex-toys sous le soleil exactement, au pays de la meilleure fraise du monde! Tagada tsoin tsoin, et je ne parle pas que d’oeufs vibrants.

Le principe de la chose est assez simple. Une marque de joujoux pour adultes sème une cargaison d’objets du plaisir dans une prairie verdoyante, qui sera vite prise d’assaut et d’un même élan par un bataillon de dames pas bêcheuses néanmoins armées de bêches et chaussées de caoutchouc. L’idée étant de faire jaillir de terre l’instrument du désir, des trésors satinés à souhait pour que durent les moments doux. Osez, osez, Josée, bine.

Sur l’air connu du « tu chauffes, tu refroidis, tu brûles », la taille de cette tombola grandeur nature prend de plus en plus d’ampleur par chez nous. Le succès démesuré de cette escapade bucolique entre nanas, outre son caractère bon enfant, s’explique sans doute par la tendance circuits courts et développement durable qui s’immisce jusque dans notre vie la plus intime.

Parlons-en tiens, d’intimité. Célébrant l’amour consensuel dans le pré et la fin des Monologues du Vagin avec plus de 2000 nymphomanes virtuelles adeptes du selfie et de l’auto-satisfaction 2.0, je suis prise. D’un doute. Et si nos gentils orgasmisateurs tentaient de pénétrer ce marché pour mieux l’inonder? Et si l’accouplement de 2 tendances lourdes (très) chères aux ménagères désespérées de plus ou moins de 50 ans, à savoir le sexe « ludique » tout en non-nuances et l’éthique toc, n’était que foutre aux yeux pour faire taire les mauvaises langues?

Car il y a bémol et bisphénol sur l’orgasme organisé. Pire! Comme à Noël, les piles ne sont même pas livrées avec les accessoires coquins exhumés à Wépion. Et leurs cousins rechargeables grâce à de mini-panneaux photovoltaïques ne sont pas partout agréés. Pire encore, mon cadeau est made in China et je ne veux même pas savoir quelles petites mains ont précédé les miennes sur cet accessoire inerte et tout gluant de glaise.

Oups, on vient de m’inviter à une démonstrations de godemichés vegan "qui aiment les animaux" et de cravaches en pneus de 4X4 recyclés.
Je ne sais comment le prendre...

Parfois, ma folle envie de 5 fruits et légumes par jour m’égare. Olé olé, oubliez les fraises espagnoles.
A Wépion ou ailleurs, faites du bien à vos oreilles et nourrissez vos appétits les plus sensuels avec une production locale, saine et goûteuse, sans engrais ni pesticides. Si possible rectangulaire.

* Les fraises de Wépion

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